De la nécessité de saisir le TASS en cas de litige avec la CIPAV
Un jugement récent du Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de LYON (n° 20132351, du 28/02/2017), rendu dans une affaire que j'ai suivie pour un de mes clients chef d'entreprise, illustre la nécessité de saisir le Tribunal des Affaires de la Sécurité Sociale (TASS), en cas de litige avec la Caisse Interprofessionnelle de Prévoyance et d'Assurance Vieillesse des Professions Libérales (CIPAV), et ce même lorsque l'enjeu financier semble ne pas justifier l'engagement d'une telle procédure.
Dans cette affaire, le dirigeant avait été soumis à des cotisations minimales de la CIVAV en l'absence de perception d'une rémunération en tant que gérant majoritaire d'une SARL.
Or, le dirigeant en question étant par ailleurs retraité du régime général des salariés, il n'était pas redebable de telles cotisations minimales de la CIPAV (une telle exonération a disparu récemment).
La CIPAV l'a accepté pour certaines des années, mais l'a refusé pour les années 2009 et 2010, pour des raisons totalement erronées et, qui plus est, fluctuentes dans le temps.
L'enjeu n'était pas élevé car il était d'environ 300 euros.
Je pensais donc que le recours à la Commission de Conciliation Amiable de la CIPAV aurait suffit à régler le litige et à permettre l'annluation desdites cotisations.
Or, la Commission de Recours Amiable de la CIPAV a rejeté le recours, pour des raisons certes différentes de la CIPAV, mais toujours totalement erronées.
Compte tenu de l'enjeu, mon client aurait pu se dire qu'il convenait de laisser tomber l'affaire et payer les cotisations.
Mais, considérant qu'il s'agissait d'une question de principe et qu'il avait fait l'objet d'un véritable harcèlement de la part de la CIPAV (plusieurs dizaines de courriers et emails échangés entre la CIPAV, mon client et moi-même s'agissant de ces 300 €...), il a souhaité que je saisisse le Tribunal des Affaries de la Sécurité Sociale de LYON, ce que j'ai fait en décembre 2013.
Cela n'a pas empêché la CIPAV de poursuivre en recouvrement mon client, notamment par l'intervention d'un huissier et d'une multitude de relances.
Le Tribunal m'a finalement convoqué pour l'audience de plaidoirie le 13 décembre 2016, soit trois ans après le dépôt de ma requête. Il convient en effet de préciser que le TASS est un tribunal qui a des délais de traitement des dossiers extrêmement longs, notamment compte tenu des multitudes de litiges entre les organismes de Sécurité Sociale et leurs assurés.
La CIPAV est demeurée siliencieuse pendant toute la procédure devant le TASS et le 9 décembre 2016, soit presque la veille de l'audience, elle m'a adressé un email pour m'informer qu'elle abandonnait l'affaire et acceptait d'annuler les cotisations...
Je me suis donc rendu à l'audience le 13 décembre 2016 et ai demandé que le TASS prenne acte du désistement de la CIPAV et insisté pour que la CIPAV soit condamnée à verser à mon client des dommages et intérêts (en compensation du dommage matériel et moral) et des frais irrépétibles (pour les frais d'avocat).
Logiquement, le jugement rendu par le TASS de LYON a été le suivant :
"Sur la demande principale
Attendu qu'il convient, à titre liminaire, de donner acte à la CIPAV, de ce qu'elle a décidé de faire droit à la demande d'annulation des cotisations de Monsieur X pour les exercices 2009 et 2010 ;
qu'il est établi que Monsieur X a versé la somme de 152 € pour l'exercice 2010 dont il demande le remboursement, qui devra en conséquence être effectué par la Caisse ;
Sur la demande de dommages et intérêts
Attendu qu'un organisme social peut voir sa responsabilité mise en cause sur le fondement de l'article 1832 du Code civil, du fait des fautes commises par ses services au préjudice d'un usager ;
Attendu qu'en l'espèce, Monsieur X, après de nombreux échanges avec la CIPAV depuis le mois de juillet 2010, a saisi la Commission de Recours Amiable de la CIPAV le 22 mars 2013 d'une contestation relative à ses cotisations afférentes aux exercices 2009 et 2010, en invoquant notamment l'exonération de cotisation minimale dont il estimait devoir pouvoir bénéficier en application de l'article D 642-4 aliné 3 du Code de la Sécurité Sociale, compte tenu de son statut de retraité du régime général ;
Que par décision du 3 octobre 2013, la Commission de Recours Amiable a rejeté la demande de Monsieur X, sans répondre à son argumentation fondée sur l'application de l'article D 642-4 alinéa 3 ;
Que le 4 décembre 2013, Monsieur X a saisi le présent tribunal d'un recours contre la décision de rejet de la Commission de Recours Amiable, sur la base du même fondement juridique ;
que la CIPAV, qui au demeurant n'a jamais remis en cause le statut de retraité du régime général de Monsieur X, a attendu le 9 décembre 2016 - soit la veille de l'audience devant le tribunal - pour faire droit à la demande de l'assuré "visant à obtenir l'activité accessoire pour les exercices 2009 et 2010", alors que l'intéressé invoquait sa situation de retraité et non son activité accessoire ;
que ces éléments révèlent un dysfonctionnement de l'organisme social dans la gestion du dossier de Monsieur X, lequel a perduré pendant plusieurs années, obligeant l'assuré à de nombreux échanges épistolaires avec la Caisse afin de défendre ses intérêts ainsi qu'à l'introduction d'un recours devant le tribunal ;
que cette situation a entraîné pour le requérant un préjudice que le tribunal estime devoir fixer à la somme de 500 € ;
Attendu par ailleurs qu'il paraît inéquitable de laisser à la charge de Monsieur X les frais qu'il a été contraint d'exposer pour les besoins de la procédure et qu'il convient en conséquence de condamner la CIPAV à lui payer la somme de 1 000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile."
Il convient d'applaudir avec les deux mains un tel jugement du TASS de LYON qui, je l'espère, mettra fasse à ses responsabilités la CIPAV et contribuera, peut-être, à remedier dans le temps à la folle gestion de cet organisme.
Pour conclure : ne vous laisser pas faire. La justice est avec vous.
LYON, le 31 mars 2017.
Edouard RABATEL
Avocat
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